(FR) Concilier travail et allaitement avec succès
A quoi devra-t-on penser si on veut concilier travail et allaitement ?
Tout d’abord, on devra faire la différence entre le bébé qui est encore allaité exclusivement au sein et le bébé qui reçoit déjà des repas solides. Dans le premier cas, normalement, il est inévitable de tirer du lait. Et à ce moment-là beaucoup de questions comme l’organisation du temps au travail, comment tirer le lait, la conservation du lait et le choix d’un mode de garde se posent.
Le cadre légal
L’article 20 de la loi de la protection de la maternité du 1er août 2001 définit les pauses d’allaitement auxquelles chaque femme a droit. Il s’agit de deux pauses de 45 minutes au début et à la fin d’une journée de travail normale de 8 heures. Ces deux pauses peuvent être rassemblées en une seule, si la pause de midi dure moins d’une heure. Pour les contrats à temps partiel, la durée des pauses d’allaitement est calculée au prorata. Le droit aux pauses d’allaitement n’est pas limité dans le temps et le bébé ne doit plus être allaité exclusivement.
Assurer une bonne coopération avec la personne qui garde le bébé
N’importe le mode de garde qui a été choisi, une bonne coopération avec la ou les personne(s) qui gardent le bébé est indispensable car la réussite du projet « travail et allaitement » en dépend en grande partie !
Il est très important d’informer à l’avance la ou les personne(s) qui vont garder le bébé et leur expliquer l’importance de son projet et leur donner les informations nécessaires. Pour certaines personnes, l’allaitement maternel est quelque chose qu’ils n’ont pas vécu sous aucune forme et pour cela, il est parfois difficile de comprendre l’importance d’un tel projet. En leur procurant les informations correctes sur la conservation du lait et les instructions nécessaires pour nourrir le bébé, la majorité des doutes peuvent certainement être évités. Il est très important que le bébé apprend à connaître quelque temps à l’avance la ou les personne(s) qui vont le garder.
L’organisation au travail
L’organisation au travail joue également un rôle très important. Tout d’abord, il s’agit d’informer son supérieur et ses collèges de travail à l’avance de son projet afin de pouvoir adapter le mieux possible les pauses d’allaitement à son travail.
Un autre point important consiste dans le fait de savoir s’il est possible de tirer du lait au lieu de travail. Beaucoup de femmes ont du mal à trouver une pièce convenable pour tirer leur lait et se voient même obligées d’aller aux toilettes ! Avec un peu de bonne volonté, il devrait quand même être possible de trouver une pièce adaptée à ces besoins. Au cas idéal, la mère pourrait allaiter son bébé à son lieu de travail. Si le bébé est gardé tout près, cette solution est certainement la plus facile. Certaines crèches acceptent que les mères passent au cours de la journée pour allaiter leurs bébés – tandis que d’autres le refusent. Le choix du mode de garde devra donc prendre en considération tous les facteurs favorables ou défavorables à la réussite du projet travail et allaitement.
Tirer le lait
Le choix d’un tire-lait dépend de beaucoup de facteurs : le temps de travail, le temps de séparation réelle et la fréquence à laquelle une femme doit tirer son lait.
Au cas où une maman travaille à temps partiel, un bon tire-lait manuel peut suffire.
Les tire-laits manuels
Le modèle de tire-lait manuel le plus fréquent actuellement est celui avec une poignée à l’arrière que la maman peut même utiliser avec une main. Un modèle intéressant offre même la possibilité de l’expression à deux phases : ce tire-lait a une poignée à double fonction : bougée vers l’avant elle stimule le réflexe d’éjection et induit le flux du lait, bougée vers l’arrière elle exprime le lait. Les tire-laits manuels sont petits, légers et faciles à transporter. Ils sont parfaits pour l’usage à court terme ou occasionnel. On peut les utiliser partout à tout moment.
En ce qui concerne les tire-laits électriques, voilà quelques détails importants:
- le tire-lait doit être automatique (que le vacuum soit établi automatiquement) sans que la mère doive pousser ou tourner un bouton,
- un réglage sans graduations du vacuum,
- une performance d’au moins 30 à 60 cycles par minute pour des petits tire-laits électriques ainsi que 78 à 120 cycles par minute pour des grands tire-laits électriques.
Les petits tire-laits électriques
Certains petits tire-laits électriques ont déjà une puissance de plus de 30 cycles par minute. Les petits tire-laits électriques doubles (où l’on peut choisir si on veut tirer les deux seins en même temps ou seulement un sein à la fois) sont préférables aux tire-laits simples, car ils présentent deux grands avantages si on tire les deux seins en même temps : Tout d’abord, on épargne au moins la moitié du temps pendant la session de pompage, et deuxièmement, la prolactine (l’hormone qui produit le lait) augmente. Pour des mères qui retournent au travail, ce sont deux avantages très intéressants !
Les grands tire-laits électriques
Les grands tire-laits électriques sont avant tout utilisés dans les maternités et les hôpitaux dans des cas de séparation mère–enfant pour des raisons médicales afin de garantir le maintien de la lactation. Pour l’usage à domicile, ces tire-laits peuvent être loués car les coûts d’achat sont assez élevés. L’avantage de ces tire-laits est qu’ils sont très performants. Ils peuvent atteindre jusqu’à 120 cycles par minute, ils permettent un net gain de temps et sont faciles à utiliser pour la maman. Un fabricant offre une nouvelle génération de tire-laits avec l’expression à deux phases, qui permet d’imiter la succion rapide du bébé au début de la tétée pour stimuler le réflexe d’éjection afin d’induire le flux du lait. Ces tire-laits sont avant tout intéressants pour les mères qui pompent fréquemment ou exclusivement. Bien que les grands tire-laits électriques soient à recommander pour un pompage fréquent afin de garantir une bonne sécrétion lactée, les désavantages sont la taille, le poids, le bruit (sauf pour la nouvelle génération) et les coûts de location assez élevés.
En conclusion, on constate donc que chaque tire-lait présente des avantages et des désavantages. Les tire-laits manuels s’apprêtent pour un emploi occasionnel, tandis que les petits tire-laits électriques sont parfaits pour les mamans qui retournent au travail. Pour les mères devant tirer très fréquemment, l’usage d’un grand tire-lait électrique peut s’avérer nécessaire.
Les préparations nécessaires : Quand et comment ?
Combien de temps à l’avance devra-t-on commencer les préparations nécessaires, voire commencer à tirer le lait et faire une réserve de lait maternel ?
En principe, il suffit de commencer environ deux semaines avant le retour au travail. Cela peut paraître assez juste, mais pour plusieurs raisons il même déconseillé de commencer trop longtemps à l’avance avec les préparations. Pour les mamans qui retournent au travail directement après le congé de maternité, donc après 12 semaines, il est très important de veiller tout d’abord à avoir une bonne lactation. Maman et bébé devraient avoir l’occasion – après avoir surmonté les difficultés du début – de profiter au maximum de l’allaitement sans aucune contrainte. Pour certaines femmes il peut s’avérer nécessaire de se procurer une réserve en lait maternel au congélateur afin de remédier à des imprévus.
Si le bébé a déjà neuf mois lors du retour au travail, la situation est déjà différente. A cet âge-là beaucoup de bébés ont déjà un ou deux repas avec des solides, et normalement la mère n’a plus besoin de tirer son lait. Si jamais elle devra en tirer toujours, normalement, ce sera une plus petite quantité. Et ces mamans sont souvent déjà habituées à tirer le lait.
Comment tirer le lait, combien de fois et quand ?
Au cas idéal, on devra tirer autant de fois que l’enfant tète normalement. Si cela n’est pas possible, la mère devra veiller à extraire juste un petit peu de lait pendant les longs intervalles, afin d’éviter un engorgement. Pendant le pompage, une atmosphère calme et agréable est la meilleure condition pour réussir.
Quand est le moment idéal pour tirer le lait ?
L’expérience a montré que tôt le matin est un bon moment pour tirer le lait, car à ce moment-là le taux de la prolactine (l’hormone qui produit le lait) est plus haut et par conséquence, il y a plus de lait. On peut également tirer son lait entre deux tétées ou lors d’un intervalle plus long entre deux tétées. Certaines mères n’arrivent pas à s’habituer au pompage et préfèrent extraire leur lait manuellement, surtout lorsqu‘elles n’ont pas besoin de grandes quantités.
Quels sont les problèmes qui peuvent surgir ?
Faire déclencher le réflexe d’éjection est certainement un des plus grands défis en tirant le lait, car pendant la tétée cela se fait automatiquement, contrairement au pompage. Des exercices de relaxation, des compresses chaudes, un massage du sein peuvent y remédier. Certaines femmes arrivent assez facilement à tirer le lait, tandis que pour d’autres c’est plus difficile. Il est très important de ne pas se mettre sous pression pour ne pas entrer dans un cercle vicieux. Pour cela, il peut s’avérer raisonnable de faire une petite réserve avant la reprise du travail.
Qu’est-ce qu’on peut faire si on n’arrive pas à tirer seulement des petites quantités ?
Tout d’abord, il faudra examiner le tire-lait pour voir s’il a été monté correctement. Ensuite, il s’agit de voir si la téterelle a la bonne taille et si le mamelon a été centré correctement. En fait, il est tout à fait normal qu’on n’arrive pas à tirer de très grandes quantités au début. Pour que les seins puissent s’habituer au pompage, il est même préférable de tirer des petites quantités. En plus, on peut facilement tirer plusieurs fois par jour et collecter les petites quantités dans un même récipient.
Si le pompage ne fonctionne vraiment pas du tout, certaines femmes ont trouvé la solution d’allaiter leur bébé et de tirer le lait au même moment sur l’autre sein. Avec un peu d’expérience, cette méthode est possible avec un tire-lait manuel ou un tire-lait électrique.
Conservation du lait maternel
(N.B. ces informations sont valables pour un usage domestique et pour des bébés nés à terme et en bonne santé)
- Au réfrigérateur : à moins de 4°C le lait se conserve pendant 3 jours (72 heures), et pendant 4-8 jours avec une très bonne hygiène (ne pas mettre dans la porte du frigo).
- A température ambiante : le lait maternel frais se conserve pendant 3-4 heures à une température entre 19 et 29°C (6 à 8 heures avec une très bonne hygiène).
- Dans le compartiment pour surgelés du réfrigérateur : Une à deux semaines.
- Dans le compartiment d’un combiné réfrigérateur congélateur : trois à quatre mois.
- Dans un congélateur séparé à -4°C-20°C : six mois et plus (même jusqu’à 12 mois).
Usage, décongélation et réchauffage du lait maternel
Le lait maternel peut être collecté pendant 24 heures au frigo.
Une fois tiré, la crème se sépare du reste du lait, presque transparent – on n’a qu’à le secouer pour que les différents ingrédients se mélangent à nouveau. Il est préférable de congeler des portions de 60 à 120 ml car jusqu’à l’âge de 6 mois, un bébé qui tète toutes les 2-3 heures a besoin de 60-120 ml de lait maternel par tétée. Dans ce contexte, il est bon à savoir, que les bébés allaités ont besoin de moins de lait que les bébés nourris au lait artificiel – bien entendu à la même croissance, car le lait maternel est mieux absorbé par le corps. Après la décongélation, le lait se conserve encore pendant 24 heures au frigo (dans un récipient avec un couvercle), sans couvercle le lait se conserve pendant 12 heures. Pour décongeler le lait maternel, le mettre au frigo ou tenir le récipient sous l’eau courante froide et le réchauffer au bain marie / chauffe-biberons.
Ne jamais réchauffer le lait maternel aux micro-ondes qui détruit certains de ses composants.
Le lait maternel congelé peut avoir un goût savonneux dû à la séparation des graisses, ce qui normalement ne gêne pas les enfants.
Une question posée fréquemment est si on peut garder du lait restant après un repas. Une étude a montré qu’il n’est pas nécessaire de jeter du lait non consommé (s’il s’agissait à l’origine du lait réfrigéré et non congelé). On peut le mettre au réfrigérateur et le donner à un repas suivant, cependant on devrait le garder seulement pendant une à deux heures car ce lait a été en contact avec les germes du bébé.
Comment administrer le lait ? Biberon, gobelet ou soft-cup ?
Cette question est sûrement une des questions primordiales pour les mamans. D’un côté, il est certainement plus facile de donner le lait avec le biberon, de l’autre côté, beaucoup de bébés allaités refusent le biberon – au moins au début, parce qu’ils n’aiment pas la tétine et parce qu’ils ne savent pas comment téter au biberon. Il faut savoir que la technique de succion au biberon est totalement différente à la succion au sein. Le choix dépend également de la personne qui garde le bébé.
La majorité des grand-mères ont élevé leurs bébés au biberon et ont donc du mal avec un mode d’alimentation alternatif comme le gobelet ou le soft-cup, qui peut être une excellente alternative au biberon avec son récipient qui peut contenir jusqu’à 80ml et son bec en silicone en forme de cuillère.
Le rythme du bébé
La majorité des bébés s’adaptent assez bien au nouveau rythme de vie. Beaucoup de bébés préfèrent dormir la plupart du temps et attendre le retour de leur mère. Il se peut donc que les bébés sont beaucoup plus actifs durant la soirée et la nuit – même s’ils ont déjà commencé à faire leur nuit avant. Il s’agit donc de s’adapter à cette situation et partager le sommeil avec son bébé pour pouvoir allaiter facilement durant la nuit.
Allaiter pendant la nuit fait augmenter automatiquement le taux de la prolactine et fait donc augmenter la production lactée. Naturellement, il ne faut pas oublier que chaque bébé est différent, mais dans tous les cas, l’allaitement peut aider à mieux gérer la séparation mère-enfant. La plupart des mères qui retournent au travail et veulent concilier travail et allaitement sont conscientes de ce fait et justement pour cette raison, le maintien de leur relation d’allaitement leur tient tellement au cœur.
La conciliation de la vie professionnelle et de l’allaitement dépend certainement de beaucoup de facteurs. Selon mon expérience, la grande majorité des femmes arrivent très bien à concilier travail et allaitement – si les conditions sont bonnes et si leur entourage les soutient.
Ute Rock
Consultante en lactation IBCLC
(article « baby info » 01/2018)